Souvenirs de la dépathologisation de l'homosexualité dans le DSM
Jack Drescher
Psychiatre membre de l’American Psychiatric Asssociation, psychanalyste et professeur de psychiatrie à l’Université de Columbia aux Etats-Unis d’Amérique.
Traduction d’Emmanuel Cannou avec l’aimable autorisation de son auteur.
Introduction.
En 1973, l’American Psychiatric Association (APA) a retiré le diagnostic d’ « homosexualité » de la deuxième édition de son Manuel statistique et diagnostique des troubles mentaux [1,2]. Cet aboutissement a été rendu possible par la comparaison qui fut faite entre des théories concurrentes : celles qui considéraient l’homosexualité comme une pathologie et celles qui la considéraient comme normale [3,4,5,6]. Afin d’expliquer la manière dont cette décision a été adoptée, cet article passe en revue quelques-unes des théories de même que certains arguments scientifiques à travers l’histoire qui ont d’abord conduit à inclure l’homosexualité dans le DSM-I [7] et le DSM-II. [8]. Les théories alternatives qui ont finalement mené au retrait de l’homosexualité du DSM-III [9] et des éditions suivantes du manuel [10,11,12,13] sont également abordées. L’article se termine par une discussion sur les conséquences socioculturelles de cette décision qui date de 1973.
Les théories de l’homosexualité.
Il est possible de formuler une typologie descriptive des théories étiologiques de l’homosexualité à travers l’histoire moderne. Celles-ci se répartissent généralement en trois vastes catégories : la pathologie, l’immaturité et la variation normale [14,15,16].
Les théories de la pathologie.
Ces théories considèrent l’homosexualité adulte comme une maladie, une déviance au regard de la norme développementale, hétérosexuelle [17]. Un comportement genré atypique, et même des sentiments, indiquent la présence de symptômes de la maladie ou de troubles. Les professionnels de la santé mentale doivent nécessairement y remédier. Ces théories soutiennent qu’une défaillance interne ou qu’un agent pathogène externe sont à l’origine de l’homosexualité et que ces incidents peuvent survenir dans la période prénatale ou post-natale (par ex. exposition hormonale intra-utérine, maternage excessif, paternité inadéquate ou hostile, abus sexuel, etc...). Les théories relatives à la pathologie ont tendance à voir l’homosexualité comme le signe d’une défaillance, ou même comme une transgression morale, sans compter que certains théoriciens sont plutôt portés à croire que l’homosexualité est un mal social. Par exemple, le psychiatre et psychanalyste Edmund Bergler est tristement célèbre pour avoir écrit dans un livre à destination du grand public : « Je n’ai rien contre les homosexuels ; pour moi, ce sont des gens malades qui ont besoin d’une aide médicale…Pourtant, même si je n’ai rien contre, je dirais que les homosexuels sont des personnes la plupart du temps désagréables, quelle que soit leur apparence extérieure, agréable ou désagréable… Leur enveloppe est un mélange de subtilité, d’agression masquée, de plaintes. Comme tous les masochistes psychiques, ils sont avertis quand ils sont confrontés à une personne plus forte, impitoyables lorsqu’ils sont au pouvoir, sans scrupules pour piétiner une personne plus faible. [18], (pp. 28-29).
Les théories de l’immaturité.
Ces théories, généralement de nature psychanalytique, considèrent les expressions comportementales ou de sentiments homosexuels dans l’enfance comme une étape normale sur le chemin du développement de l’hétérosexualité à l’âge adulte [19,20]. Idéalement, l’homosexualité ne devrait être qu’une phase passagère qui est à traverser. Cependant, en tant qu’ « arrêt du développement », l’homosexualité, à l’âge adulte équivaut à un retard de croissance. Les tenants de ces théories ont tendance à considérer cette immaturité comme relativement bégnine, ou du moins comme n’étant pas « mauvaise » par comparaison avec ceux qui soutiennent que l’homosexualité est une forme de pathologie.
Les théories de la variation normale.
Ces théories traitent de l’homosexualité comme un phénomène qui se produit naturellement [21,22,23,24]. De telles théories considèrent les personnes homosexuelles comme différentes, dès la naissance, mais il s’agit d’une différence naturelle qui affecte une minorité de personnes, comme la gaucherie. La croyance culturelle contemporaine d’après laquelle « les gens naissent homosexuels » est une théorie de la variation normale. Comme ces théories dressent une équivalence entre ce qui est normal et ce qui naturel, elles définissent l’homosexualité comme quelque chose de bon (ou, au départ, de neutre). De telles théories ne voient aucune place pour l’homosexualité dans un manuel de diagnostic psychiatrique.
Les croyances liées au genre.
Il est rare de trouver une théorie de l’homosexualité qui ne prenne pas appui sur des croyances contenant des idées culturelles implicites au sujet des qualités « essentielles » des hommes et des femmes [14, 16, 25]. « Les vrais hommes » et « les vraies femmes » sont des mythes culturels très puissants avec lesquels chacun doit faire face. Les gens expriment des croyances liées au genre, les leurs et celles de la culture où ils vivent, dans un langage courant car il acceptent indirectement ou explicitement des significations genrées, qu’ils attribuent à ce qu’ils font eux-mêmes et à ce que les autres font, pensent et ressentent. Les croyances liées au genre touchent la plupart des aspects de la vie quotidienne, y compris des préoccupations ordinaires telles que le type de chaussures que les hommes devraient porter ou des questions « plus profondes » au sujet de la masculinité, notamment si les hommes doivent pleurer devant tout le monde ou bien dormir avec un autre homme. Les croyances liées au genre nous plongent dans des questions à propos de la carrière qu’une femme devrait poursuivre. Autrement, elles interrogent le sens qu’une femme au travail aurait de choisir entre renoncer à élever ses enfants et poursuivre une carrière d’une manière plus bagarreuse que ne le ferait un homme.
Les croyances liées au genre sont généralement fondées sur la bicatégorisation. Le plus ancien et célèbre de ces modèles est celui de la bipartition mâle et femelle. Cependant, on remarque aussi au XIXème siècle une bipartition de l’homosexualité et de l’hétérosexualité (ou gay et hétéros au XXème siècle). Quant au XXIème siècle, il voit émerger la bipartition transgenre/cisgenre. Il convient de noter que ces modèles de bicatégorisation ne sont pas bornés à l’usage courant. De nombreuses études scientifiques sur l’homosexualité contiennent également des bipartitions de croyances implicites (et souvent explicites). Par exemple, l’hypothèse d’une intersexuation de l’homosexualité soutient que le cerveau des individus homosexuels présente des caractéristiques qui seraient considérées comme plus typiques que l’autre sexe. La croyance essentialiste de genre implicite, dans les hypothèses d’intersexuation, dit qu’une attirance pour les femmes est un trait masculin qui, chez Sigmund Freud [28], par exemple (voir aussi ci-dessous), a conduit à sa théorie selon laquelle les lesbiennes ont une psychologie masculine. De même, les chercheurs en biologie ont supposé que les homosexuels masculins ont un cerveau qui ressemble davantage à celui des femmes [29] ou qu’ils reçoivent des chromosomes X (femelles) de leur mère [30].
Les croyances liées au genre, en général, ne permettent que l’existence de deux sexes. Afin de maintenir cette bipartition, la plupart des cultures ont traditionnellement insisté sur le fait que chaque individu se voit affecté dans la catégorie des hommes ou des femmes, dès sa naissance. En ce sens, les individus se conforment par la suite à la catégorie qui leur a été attribuée. Les catégories « homme » et « femme » sont considérées comme devant s’exclure l’une de l’autre, bien qu’il y ait des exceptions, comme dans le Banquet de Platon et certaines cultures amérindiennes [31]. (Voir aussi Fausto-Sterling [32,33,34] pour ses critiques scientifiques raisonnées à propos de la bicatégorisation des genres). Ces croyances soulignent les théories en vogue au milieu du XXème siècle selon lesquelles des enfant nés avec une anomalie génétique devaient subir des interventions médicales inutiles dans le but de diminuer l’anxiété de leurs parents quant au fait de savoir s’ils étaient des garçons ou des filles [25,34,35].
Les croyances rigides fondées sur le genre se développent généralement dans les communautés religieuses fondamentalistes où les informations ou explications alternatives qui pourraient remettre en question de telles hypothèses implicites et explicites ne sont pas bien accueillies. Quand on entre dans les domaines du genre et de la sexualité, il est courant de rencontrer une autre forme de pensée binaire : la « bonne moralité » pour savoir si certains types de pensées, de sentiments ou de comportements sont « bons ou mauvais » ou, dans certains cas, s’ils sont « bons ou diaboliques. » [14, 15, 16]. Cette bipartition bon/mauvais ne se limite pas à la seule religion, car le langage de la morale se retrouve inévitablement, par exemple, dans les théories sur les « causes » de l’homosexualité. Car en l’absence de certitude sur l’ « étiologie » de l’homosexualité, les croyances sur la bicatégorisation des genres et les fondements moraux qui y sont associés jouent souvent un rôle dans les théories sur les causes et/ ou les significations de l’homosexualité. Quand on reconnaît les formes narratives de ces théories, certains des jugements moraux et des croyances enchâssés dans chacune d’elles deviennent plus clairs.
Les premiers théoriciens de l’homosexualité.
Pendant une grande partie de l’histoire occidentale, les déclarations officielles à propos de la signification des comportements homosexuels étaient principalement du ressort des religions : beaucoup considérait l’homosexualité comme « male » d’un point de vue moral [36]. Cependant, tandis que la culture occidentale du XIXème siècle déplaçait le pouvoir de l’autorité religieuse sur l’autorité laïque, les comportements homosexuels, comme d’autres « péchés », ont reçu une attention accrue de la part de la loi, de la médecine, de la psychiatrie, de la sexologie et du militantisme en faveur des droits de l’Homme. En définitive, les catégories religieuses de la possession démoniaque, de l’ivresse et de la sodomie ont été transformées en catégories scientifiques de folie, d’alcoolisme et d’homosexualité.
Ainsi, l’histoire moderne de l’homosexualité commence généralement au milieu du XIXème siècle, notamment avec les écrits de Karl Heinrich Ulrichs [21]. Formé en droit, en théologie et en histoire, il pourrait être considéré comme l’un des premiers défenseurs des droits des homosexuels. Il écrivit une série de manifestes politiques critiquant les lois allemandes qui condamnaient les relations homosexuelles entre hommes. Il a émis l’hypothèse que certains hommes étaient nés avec l’esprit emprisonné d’une femme dans leur corps et que ces hommes constituaient une troisième sexe, auquel il donna le nom d’uraniste. Il a également défini une femme, dont on dirait aujourd’hui qu’elle est lesbienne, comme Urningin (anandryne), en somme l’esprit d’un homme emprisonné dans le corps d’une femme.
En 1869, le journaliste hongrois Károli Mária Kertbeny inventa pour la première fois les termes « homosexuel » et « homosexualité » dans un traité politique contre le Paragraphe 143, une loi prussienne codifiée plus tard dans le Paragraphe 175 de l’Allemagne qui condamnait le comportement homosexuel masculin [37]. Kertbeny présenta sa théorie selon laquelle l’homosexualité était innée et immuable, arguant qu’il s’agissait d’une variation normale, en contrepoids aux attitudes moralisatrices et condamnatrices qui ont conduit à l’adoption des lois sur la sodomie.
Richard von Krafft-Ebing, un psychiatre allemand, a proposé une première théorie de la pathologie, décrivant l’homosexualité comme un trouble «dégénératif ». Adoptant la terminologie de Kertbeny, mais pas ses croyances normalisatrices, Psychopathia Sexualis [18] de Krafft-Ebing, en 1886, considérait les comportements sexuels non conventionnels à travers le prisme de la théorie darwinienne du XIXème siècle : les comportements sexuels non procréateurs, y compris la masturbation, étaient considérés comme des formes de psychopathologie. C’est par antiphrase que Krafft-Ebing, anticipant sur la théorie moderne du « born gay », croyait que même si l’on pouvait naître avec une prédisposition homosexuelle, de telles inclinaisons devaient être considérées comme une maladie congénitale. Krafft-Ebing a joué un rôle important dans la diffusion auprès des communautés médicales et scientifiques du terme « homosexuel. » De même sa vision de l’homosexualité en tant que trouble psychiatrique s’est vite répandue. Psychopathia Sexualis laissait présager bon nombre d’hypothèses pathologisantes concernant la sexualité humaine dans les manuels de diagnostic psychiatrique du milieu du XXème siècle.
En revanche, Magnus Hirschfeld [38], un autre psychiatre allemand, a proposé une vision normative de l’homosexualité. Hirschfeld, un médecin ouvertement homosexuel et chercheur en « sexologie », était un des leaders du mouvement homophile allemand de son temps ainsi que le porte-étendard des théories du troisième sexe d’Ulrich [21] datant du XIXème siècle.
La théorie psychanalytique.
Réfutant directement les théories de Hirschfeld sur la variation normale et la théorie de la pathologie de Krafft-Ebing, Sigmund Freud [19] a proposé une théorie alternative qui trouverait également sa place dans l’imaginaire populaire. Comme il pensait que tout le monde naît avec des tendances bisexuelles, les expressions de l’homosexualité devenaient une phase normale du développement hétérosexuel. Cette croyance en la bisexualité innée ne permettait pas la possible existence du troisième sexe de Hirschfeld : « La recherche psychanalytique s’oppose avec la plus grande détermination à la tentative de séparer les homosexuels des autres êtres humains en tant que groupe particularisé. » [19], (p.145n). De plus, Freud a soutenu que l’homosexualité ne pouvait pas être un « signe inné de dégénérescence » comme Krafft-Ebing l’a affirmé parce que, entre autres raisons, « Il faut accorder aux porte-parole de l’ « uranisme » que certains des hommes les plus remarquables dont nous ayons jamais entendu parler étaient des invertis, peut-être même des invertis absolus »[19], (p.139). Au lieu de cela, Freud a vu les expressions du comportement homosexuel adulte comme étant dues à « l’arrêt » du développement psychosexuel, ce qui se conçoit comme une théorie de l’immaturité. Vers la fin de sa vie, Freud a écrit : « L’homosexualité n’est certainement pas un avantage mais elle n’est pas honteuse, perverse ou dégradante ; elle ne peut être classifiée comme une maladie, nous la considérons comme une variation de la fonction sexuelle, produite par un arrêt spécifique dans le développement sexuel. » [39], (p.423). Cette opinion ne le rendait pas optimiste quant aux efforts pour modifier une orientation homosexuelle en une orientation hétérosexuelle : « La tentative de transformer un homosexuel pleinement développé en un hétérosexuel n’offre pas de meilleures chances de succès que l’entreprise inverse ; la seule différence étant que cette dernière, pour des raisons d’ordre pratique, n’est jamais tentée. »[28], (p.151).
Pourtant, après la mort de Freud en 1939, la plupart des psychanalystes de la génération suivante ont fini par considérer l’homosexualité comme pathologique. Ils ont proposé une compréhension révisée de l’homosexualité ainsi que des « remèdes » psychanalytiques qui avaient échappés au fondateur de la discipline. Leurs points de vue étaient portés par les théories de Sandor Rado [40,42]. Emigré hongrois aux Etats-Unis, ses théories ont eu un impact significatif sur la pensée américaine de la psychiatrie et de la psychanalyse au milieu du XXème siècle. Rado a affirmé, contrairement à Freud, qu’il n’existait ni bisexualité innée ni homosexualité normale. L’hétérosexualité était la seule norme biologique et l’homosexualité n’était plus conçue que comme un évitement « phobique » de l’autre sexe en raison de relations parentales inadéquates. La théorisation de Rado a éclairé les travaux de Bieber et al. [42] et ceux de Socarides [43], des analystes dont les revendications dans le domaine des « remèdes » psychanalytiques pour l’homosexualité ont été largement acceptées par leur communauté professionnelle, bien qu’elles n’aient jamais été vérifiées de manière significative ou empirique (cf. Moor [44] ; Tripp [45]).
Au milieu du XXème siècle, la psychiatrie américaine a été alors fortement influencée par ces perspective psychanalytiques. Par conséquent, en 1952, lorsque l’APA publia la première édition du Manuel statistique et diagnostique des troubles mentaux (DSM-I) [7], elle a énuméré toutes les conditions que les psychiatres prenaient en considération pour qualifier un trouble mental. Le DSM-I a classé « l’homosexualité » comme « un trouble de la personnalité sociopathique. » Dans le DSM-II, publié en 1968 [8], l’homosexualité a été reclassée en « déviance sexuelle ».
Les sexologues.
Alors que les psychiatres, les médecins et les psychologues tentaient de « guérir » l’homosexualité, les chercheurs en sexologie du milieu du XXème siècle ont plutôt étudié un spectre plus large d’individus qui comprenaient des populations qui n’étaient pas des patients. Les psychiatres et autres cliniciens ont tiré des conclusions à partir d’un échantillon biaisé de patients cherchant un traitement pour guérir de l’homosexualité ou d’autres difficultés, puis ont rédigé leurs résultats sur ce groupe auto-sélectionné sous forme de rapports de cas. Certaines théories sur l’homosexualité étaient fondées sur des études dans les populations carcérales. Les sexologues, d’autre part, ont fait des études sur le terrain dans lesquelles ils sont allés recruter un grand nombre de sujets, qui n’étaient pas des patients, dans la population générale.
La recherche la plus importante dans ce domaine a été celle d’Alfred Kinsey et ses collaborateurs, publiée dans deux rapports de grande valeur [22,23]. Les rapports de Kinsey, interrogeant des milliers de personnes qui n’étaient pas des patients psychiatriques, ont constaté que l’homosexualité était plus courante dans la population générale qu’on ne voulait le croire, bien que la célèbre statistique des « 10% » soit aujourd’hui plus proche des 1 à 4 % [46]. Ce constat entrait fortement en contradiction avec les affirmations psychiatriques de l’époque d’après lesquelles l’homosexualité était extrêmement rare dans la population générale. L’étude de Ford et Beach [47] sur les diverses cultures et les comportements des animaux, a confirmé le point de vue de Kinsey selon lequel l’homosexualité était plus courante que ne le soutenait la psychiatrie et qu’on la retrouvait régulièrement dans la nature. A la fin des années Cinquante, Evelyn Hooker [24], une psychologue, a publié une étude dans laquelle elle a comparé les résultats des tests psychologiques de trente hommes gays à trente témoins hétérosexuels, dont aucun n’était psychiatre. Son étude n’a relevé aucune trace de troubles psychologiques dans le groupe des hommes gays, une conclusion qui a réfuté les croyances psychiatriques de son époque selon lesquelles tous les hommes homosexuels avaient de graves troubles psychologiques.
La décision de l’APA de 1973.
La psychiatrie américaine a dans sa quasi-totalité ignoré cet ensemble croissant de recherches en sexologie et, dans le cas de Kinsey, a exprimé une hostilité extrême face aux résultats qui contredisaient ses propres théories [48]. Il convient également de noter que certains groupes d’activistes homophiles (gays) du milieu du XXème siècle ont accepté le modèle de la maladie psychiatrique comme une alternative à la condamnation sociale de « l’immoralité » de l’homosexualité. Ils étaient disposés à travailler avec des professionnels qui cherchaient à « traiter » et « guérir » l’homosexualité. Cependant, d’autres militants gays ont rejeté avec force le modèle pathologique en tant qu’il contribuait largement à la stigmatisation associée à l’homosexualité. C’est ce dernier groupe qui a porté les théories modernes de la recherche en sexologie à l’attention de l’APA. A la suite des émeutes de Stonewall en 1969 à New-York [49], des militants gays et des lesbiennes, estimant que les théories psychiatriques contribuaient de manière très importante à la stigmatisation sociale anti-homosexuelle, ont perturbé les réunions annuelle de 1970 et 1971 de l’APA.
Comme Bayer [1] l’a fait remarquer, des facteurs à l’extérieur et à l’intérieur de l’APA allaient conduire à une nouvelle conception de la place de l’homosexualité dans le DSM. Outre les résultats de la recherche provenant de la psychiatrie extérieure, il y avait un mouvement antipsychiatrique croissant [50], sans parler des critiques des études culturelles qui tournaient en ridicule l’histoire d’une médecine excessivement diagnostique, citant l’exemple de la drapétomanie, un « trouble des esclaves ayant tendance à fuir leur propriétaire en raison de leur propension innée à l’envie de voyager. » [51], (p.357).
Il y avait aussi un changement de génération de garde qui émergeait au sein de l’APA, composé de jeunes leaders qui encourageaient à mettre en place une plus grande conscience sociale [2]. Très peu de psychanalystes, comme le fit Judd Marmor [5,52], contestaient également l’orthodoxie psychanalytique relative à l’homosexualité. Cependant, le catalyseur le plus important du changement diagnostique a été l’activisme gay.
Les manifestations de militants gays ont réussi à attirer l’attention de l’APA et ont conduit à ériger des banderoles éducatives sans précédent lors des deux réunions annuelles suivantes du groupe. Une banderole de 1971, sur laquelle était écrit « Gay is good », présentait des militants gays, Franck Kameny et Barbara Gittings. Ils expliquaient aux psychiatres, parmi lesquels très peu avaient entendu parler de cela, que la stigmatisationque provoquait le diagnostic d’ « homosexualité » [53, 54, 55]. Kameny et Gitttings ont repris la parole lors de la réunion de 1972, cette fois rejoints par John Fryer. Fryer, qui était médecin, est apparu comme le Dr H Anonymous, un « psychiatre homosexuel » qui, étant donné la crainte réaliste des conséquences professionnelles défavorables de se dévoiler à ce moment-là, avait caché sa véritable identité sous un masque devant le public. Il prit alors la parole à propos de la discrimination que les psychiatres gays subissaient dans leur propre profession [1,2].
Pendant que des manifestations se tinrent et que des banderoles furent brandies, l’APA s’engageait dans un processus de délibération interne pour examiner la question : « L’homosexualité devait-elle rester un diagnostic psychiatrique ? » Cela prit la forme d’un symposium lors de la réunion annuelle de 1973 de l’APA au cours de laquelle les participants favorables et opposés au retrait tinrent un débat à ce sujet : « L’homosexualité devrait-elle figurer dans la nomenclature de l’APA ? » [56]. Le Comité de la nomenclature, l’organisme scientifique de l’APA qui s’occupe de cette question, a également débattu de la question relative à ce qui caractérise un trouble mental. Robert Spitzer, qui a présidé un sous-comité chargé d’examiner la question, « a passé en revue les caractéristiques des divers troubles mentaux et il en a conclu que, à l’exception de l’homosexualité et peut-être de certaines autres ‘’déviances sexuelles’’, celles-ci causaient toutes régulièrement une détresse subjective dans laquelle étaient associée une altération généralisée de l’efficacité sociale du fonctionnement. » [57], (p.211). Arrivé à cette nouvelle définition des troubles mentaux, le Comité de la nomenclature a convenu que l’homosexualité en soi n’était pas un trouble. Plusieurs autres comités et organes délibérants de l’APA ont ensuite examiné et accepté leurs travaux et recommandations. En conséquence, en décembre 1973, le conseil d’administration de l’APA (BOT) a voté pour retirer l’homosexualité du DSM.
Des psychiatres de la communauté psychanalytique se sont cependant opposés à cette décision. Ils ont demandé à l’APA d’organiser un référendum demandant à tous les membres de voter pour ou contre la décision du Conseil d’administration. La décision de révocation a été confirmée par une majorité de 58% des 10000 membres votants. Il convient de noter que les psychiatres n’ont pas voté, comme cela est souvent rapporté dans la presse grand public, sur le fait de savoir si l’homosexualité devait rester un diagnostic. Ce sur quoi les membres de l’APA ont voté était : « Pour ou contre l’avis de favoriser ou de s’opposer » à la décision du Conseil d’administration de l’APA et, par extension, au processus scientifique qui avait été mis en place pour prendre cette décision [1], (p,148). En outre, les opposants à la destitution de 1973 ont tenté à plusieurs reprises de discréditer le résultat du référendum en déclarant que « la science ne peut pas être décidée par vote » [58]. Cependant, ils négligent généralement de mentionner que ceux qui sont favorables au maintien du diagnostic sont ceux qui ont demandé un vote en premier lieu. Quoi qu’il en soit, en 2006, l’Union astronomique internationale a voté pour savoir si Pluton était une planète [59,60], démontrant que même dans une science dure comme l’astronomie, l’interprétation des faits est toujours filtrée par la subjectivité humaine.
Quoi qu’il en soi, les événements de 1973 n’ont pas immédiatement mis fin à la pathologisation de certaines présentations de l’homosexualité par la psychiatrie. Car à la place de « l’homosexualité », on trouvait un nouveau diagnostic dans le DMSM-II : la perturbation de l’orientation sexuelle (POS). La POS considérait l’homosexualité comme une maladie à condition qu’une personne attirée par une autre du même sexe trouvait cette situation angoissante au point de vouloir changer d’orientation [56,57]. Le nouveau diagnostic légitimait la pratique des thérapies de conversion sexuelle (et justifiait vraisemblablement le remboursement de l’assurance pour ces interventions également), même si l’homosexualité en soi n’était plus considérée comme une maladie. Le nouveau diagnostic prévoyait également la possibilité improbable qu’une personne mécontente d’une orientation hétérosexuelle puisse demander un traitement pour devenir homosexuelle [61].
La POS a ensuite été remplacée dans le DMS-III [9] par une nouvelle catégorie appelée « homosexualité égo-dystonique » (abrégée par EDH, en anglais) [57]. Cependant, il était évident pour les psychiatres, après une décennie, que l’inclusion de la POS, puis de l’EHD, était le résultat de compromis politiques antérieurs et qu’aucun des diagnostics ne répondait à la définition d’un trouble dans la nouvelle nosologie. Sinon, on pourrait considérer toutes sortes de troubles de l’identité comme des troubles psychiatriques. « Les gens de couleur mécontents de leurs origines devraient-ils être considérés comme des malades mentaux ? », demandèrent les critiques. Qu’en est-il des personnes de petites tailles, mécontentes de leur sort ? Pourquoi pas une masturbation ego-dystonique [62] ? En conséquence, l’homosexualité ego-dystonique a été supprimée de la révision suivante, le DSM-III-R, en 1987 [10]. Ce faisant, l’APA a implicitement accepté une variante de la vision normale de l’homosexualité d’une manière qui n’avait pas été possible quatorze ans auparavant [63].
Conclusions.
La révision diagnostique de 1973 qui a été faite par l’APA marque le début et la fin de la participation officiellement organisée de la médecine à la stigmatisation sociale de l’homosexualité. Des changements similaires se sont également produits progressivement dans la communauté internationale de la santé mentale. En 1990, l’Organisation Mondiale de la Santé a supprimé l’homosexualité en tant que telle de la Classification Internationale des Maladies (CIM-10) [64]. En conséquence, les débats sur l’homosexualité se sont petit à petit déplacés de la médecine et de la psychiatrie vers des domaines moraux et politiques, les institutions religieuses, gouvernementales, militaires, médiatiques et éducatives étant dépourvues de rationalisation médicale ou scientifique en tant qu’instrument de discrimination.
En conséquence, les attitudes culturelles à l’égard de l’homosexualité ont changé aux Etats-Unis et dans d’autres pays, car ceux qui ont accepté l’autorité scientifique sur ces questions ont progressivement accepté le point de vue normalisateur. Car si l’homosexualité n’est plus considérée comme une maladie, et si l’on n’accepte sans aucune restriction les interdictions bibliques contre elle, et, dès lors que les homosexuels sont capables et prêts à fonctionner comme des citoyens productifs, alors qu’y a-t-il de mal à être gay ? En outre, s’il n’y a rien de mal à être gay, quels principes moraux et juridiques la société, dans son ensemble, devrait-elle endosser pour aider les homosexuels à vivre ouvertement leur vie ?
Le résultat, dans de nombreux pays, a finalement conduit, entre autres, à (1) l’abrogation des lois sur la sodomie qui criminalisaient l’homosexualité ; (2) la promulgation de lois protégeant les droits humains des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) dans la société et sur le lieu de travail ; (3) la capacité du personnel LGBT à servir en toute ouverture dans l’Armée ; (4) l’égalité du mariage et les unions civiles dans un nombre toujours croissant de pays ; (5) la facilitation des droits d’adoption des parents homosexuels ; (6) l’assouplissement des droits de succession des conjoints gays ; et (7] un nombre sans cesse croissant de confessions religieuses qui permettraient aux personnes ouvertement gays de servir dans le clergé.
Et il y a bien plus encore. En médecine, en psychiatrie et dans d’autres professions de santé mentale, la suppression du diagnostic du DSM a conduit à un changement important sur l’origine de l’homosexualité et sur la manière dont on peut la traiter. On se centre davantage sur les besoins de santé et de santé mentale des populations de patients LGBT [65].
Conflits d’intérêt
L’auteur déclare ne pas avoir de conflit d’intérêt.
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Regards jungiens
La question de l'homosexualité, Joseph David Shesko, Dans Cahiers Pungiens de psychanalyse 2010/2 (N° 132), pages 117 à 126.
https://www.cairn.info/revue-cahiers-jungiens-de-psychanalyse-2010-2-page-117.htm
"C.G. Jung, Anima/us, Homosexuality and Integrity". John Beebe in conversation with Stefano Carpani